mercredi 31 mars 2010

Des hauts et débats

Le débat entre Salman Rushdie et Paul Auster a volé très haut hier, vu qu'ils se sont posé à eux-mêmes à peu près toutes les questions qu'on aurait pu leur poser. Le pauvre Augustin Trapenard, qui tentait d'orchestrer l'événement, n'a pratiquement rien eu à faire puisqu'à chaque fois qu'il abordait un sujet ils sortaient des dissertations en trois parties et trois sous-parties absolument impeccables et ne nécessitant aucune relance.

Le premier quart d'heure, comme de bien s'accorde, a été consacré à la fatwa de Rushdie, qui a clos le sujet rapido avec une petite vanne provocatrice : 'Je me permets de vous faire remarquer que dans ce petit différend qui nous a opposés, l'ayatollah Khomeini et moi-même, il y en a un des deux qui est mort, et ce n'est pas moi'. Quel homme.

Et puis les deux écrivains ont rappelé, à mon plus grand bonheur, qu'une bonne histoire est la clef d'un roman, l'équivalent du moteur dans une belle bagnole. Ils ont tous les deux rendu hommage à la tradition orale et aux contes pour enfants. Ils ont même envoyé quelques piques bien senties aux écrivains du début du XXe qui ne sont pas, selon eux, des 'storytellers'.

Il y avait évidemment (et je dirais même heureusement) énormément de monde pour la rencontre, mais on a réussi à bien se placer en arrivant 25 minutes à l'avance. Soudain au milieu du débat une espèce de gros vieux bonhomme est venu pousser tout le monde sur la gauche et apparemment il puait sévère vu que la troupe de bourgeois dans laquelle il s'était tapé l'incruste ont directement enturbanné leurs écharpes autour de leur nez en fronçant les sourcils. Le gros bonhomme a pris à peu près douze mille photos d'Auster et Rushdie sur son portable, et puis il est reparti à la grande satisfaction des indisposés.

Il semblerait que le Salon du Livre ait embauché pour cette rencontre à la fois la meilleure interprète anglais-français du monde et la plus nullissime. La meilleure traduisait Auster, la plus nulle Rushdie, c'était extrêmement amusant. On a eu droit à de magnifiques erreurs de traduction de la part de la seconde, qui nous a notamment traduit 'disagreement' par 'désagrément'. J'avais envie de crier 'CALQUE!!!' et d'enlever cinq points dans la marge comme faisait mon prof d'anglais au lycée dans ses corrections de versions.

Bref, c'était une excellente rencontre, assez inattendue dans un Salon où les 'événements' ont plutôt impliqué Geneviève de Fontenay, Lionel Jospin et autres people dont on se demande bien en quoi ils sont liés de près ou de loin à la littérature.

J'y retourne cet après-midi pour un dernier débat public, espace Julien Gracq à 15h30, avec d'autres lauréats du prix du jeune écrivain.

2 commentaires:

  1. Je viens d'écouter la rencontre sur le podcast du salon du livre. "Le pauvre Augustin Trappenard" a bien sûr tout orchestré, contrairement à ce que vous laissez entendre. Il suffit d'écouter son introduction qui annonce parfaitement le plan de la rencontre, et de remarquer que c'est lui qui recentre le débat à chaque fois... http://www.salondulivreparis.com/site/FR/Ecouter_/_Voir,I1562.htm?KM_Session=2fd01f02e0b722a10eb2b46e70adcaf7

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  2. Bien sûr, son introduction était parfaite et il était très bien tout le long! si ma phrase est mal prise, j'en suis désolée. Je voulais juste dire qu'avec Rushdie et Auster il avait peu à faire pour qu'ils partent dans de longues réponses parfaitement organisées et se relancent l'un l'autre.

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